mardi 25 janvier 2005

L'âme balafrée

Il a fouetté son âme, l’a traversée puis il s’est sauvé.

C’était en juillet.

Elle avait dix-sept ans.

Une journée qui avait débuté fort aise de ses lumières chaudes. Sable rouge, bleu mouvant, moutons blancs et une tête remplie de rêves.

Ce jour-là a été la fin de son monde. Mains criminelles. Le ciel ténébreux, les vents qui font mal, la lourdeur d’une tempête qu’elle n’attendait pas. Le tonnerre s’est mis à rouler, plus fort, toujours plus fort. Ses vagues se brisaient en écume pendant que le diable roulait sur son dos. Douleur au spectre de l’éternité. Et l’éclair a terminé sa route à travers l’orage.

Elle ne savait pas combien de temps avait duré l’apocalypse. Son corps lui faisait mal, beaucoup trop mal. Elle sentait ses bras tourner au bleu et elle a pensé qu’il serait aussi bleu que celui de la mer, cette mer qu’elle détestait. Elle l’avait suppliée de monter, de se montrer monstrueuse pour venir la sauver. Mais rien. Elle était restée là, à regarder se faire pénétrer une âme pour rien, par instinct animal ou vengeur.

Étendue, tendue, elle regardait sans voir, sans rien dire, pleine du poison et vide du sens. Il avait traversé son corps mais c’est de son âme qu’il avait fait une sans abri. Elle a gardé le silence pendant des mois, essayant de trouver un moyen pour casser sa douleur, chancelante sur le roc qu’elle sentait crouler sous ses pas. Puis elle a décidé de ne plus voir, ni le jour, ni la nuit. Mais la mort a été trop lâche pour traverser sa vie.

Des milliers d’heures ont passé à coups de poings, à regarder et à effacer les fantômes. Des milliers d’heures à béquiller. Un ange est passé dans sa vie, un sans abri comme elle. Il a dit, écrit et chanté les derniers hurlements qu’elle taisait de ses bas fonds. Puis elle a parlé. Elle a aimé aussi, encore, la mer et lui. Et il a rebaptisé son corps.

Parfois, de sa mémoire tatouée, il lui arrive d'en vouloir encore un peu à la mort de lui avoir fait faux bond.

2 Comments:

Blogger Bertrand said...

Petit extrait d'une chanson mienne me semblant à propos....

" Comme si l'printemps v'nait par en dedans,
pour qu'l'âme bourgeonne de ses blessures,
au moins pour qu'la mort soit moins sûre,
de pouvoir tuer avant son temps..."

Voilà... On passe même pas l'chapeau...

10:45 p.m.  
Blogger MARGUERITE ROSE said...

C'est bien joli ça...
Merci !
(p.s. Quand j'aurais plus de temps, j'ajouterai votre blog sur mon site également)

4:35 p.m.  

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