dimanche 16 janvier 2005

Quand la marée monte, des fois ça déborde !

(ou l'assistance emploi et la perversité)

Comment donner un sens à la réinsertion sociale ? Sans le concours de politiciens avisés, responsables et surtout visionnaires, on peut difficilement parler de rééquilibrage si on voit le fossé qui ne cesse de se creuser entre pauvres et riches. Que faudrait-il alors pour rendre les prestataires de l’assistance emploi aptes à survivre ou revivre ? J’ose penser que la perversité aura une fin.

À ce titre, les projets de loi se sont voulus plutôt utopique. Entre les paragraphes du texte de loi et la réalité des centres Emploi-Québec, la marge est grande. On prêche haut et fort la réinsertion et les moyens qu’on donne aux prestataires alors qu’en réalité, il n’y en a bien peu et qu’il risque de ne pas avoir plus de choses en branle d’ici peu.

Comment peut-on oser parler d’insertion professionnelle quand on inscrit les gens obligatoirement – car ils ont pour plusieurs des coupures de chèque s’ils refusent de se présenter – à des services inadéquats. On les réfère à des programmes visant leur réinsertion sur le marché du travail : élaboration de cv, techniques de recherche d’emploi, stage en milieu de travail, etc. Alors que les référer à des programmes de ce genre s’avèrent dès le départ un leurre majeur puisqu’ils n’ont plus aucun lien avec eux-mêmes et leurs croyances.

Et qui les réfèrent au fait ? Il faut tout d’abord comprendre que les individus en perte d’emploi sont confinés à des rencontres administratives. L’expression «apte au travail» est devenu un terme prisé par une société qui a tendance à réagir plutôt qu’à agir, bien trop souvent selon des statistiques ou des tendances plutôt qu’avec des êtres humains.

Quand je vois le nombre de rapports qui sont sortis de mon bureau avec mention «référé pour support psychologique», «apte à occuper un travail en milieu adapté uniquement», «référé à l’urgence du CLSC (ou hôpital), tendances suicidaires», «référé à un travailleur social, problèmes de comportement», je ne rêve pas, c’est la réalité du terrain. Comment expliquer que les agents d’Emploi-Québec ne voient pas l’inaptitude au travail chez des cas aussi majeurs ? Bravo pour le professionnalisme !

Plus généralement, les personnes sur l’assistance emploi vivent une situation d’exclusion parce que socialement retirée du marché du travail. De ce fait, elles sont exclues, se sentent exclues et traversent, à un moment ou à un autre, un état d’auto-exclusion. Pourtant, l’exclusion ne se définit pas de l’extérieur à partir de critères administratifs; l’exclu, c’est celui qui le vit, qui le dit… et on ne se reconstruit pas une identité du jour au lendemain.

Les programmes de réinsertion réussissent à un certain nombre de candidats, principalement ceux qui sont prestataires depuis moins de deux ans. Mais nous parlons ici uniquement de travail. Rares sont les centres d’emploi qui acceptent un retour aux études, sinon de très courte durée… ça coûte cher voyez-vous !

Mettons sur pied des programmes d’«avant insertion», d’alphabétisation, d’équivalence de niveau secondaire, de formations selon les réels besoins du marché à moyen et long termes et offrons-les. Établissons un réel partenariat avec les entreprises et développons des formations en emploi. Et si ça n’était que le début, ces actions seraient beaucoup plus profitables. Et, de grâce, arrêtons de les «garocher» et ayons tout d'abord un rapport vrai et humain avec eux.

Ayons une cohésion constante et globale une bonne fois pour toute !